Van Golu Express (Van Gölü Ekspresi) : voyager en train en Turquie

Le « Van Golu Express » (ou Van Gölü Ekspresi, en turc) est un train mythique qui traverse toute l’Anatolie au départ d’Ankara pour rejoindre le lac de Van. Le trajet dure environ 26h30 jusqu’à Tatvan, sur la rive Ouest du lac. Il est possible de prolonger cette aventure ferroviaire pour rallier la grande ville de Van, sur l’autre rive, en prenant un ferry. Dans cet article, je vous emmène avec moi dans cette épopée des temps modernes dont je rêvais depuis plusieurs années.

Le Doğu Express traverse l’Anatolie pratiquement à l’horizontale pour rejoindre la ville de Kars, à l’extrême Est de la Turquie, près de la frontière arménienne. Il circule depuis 1936. A l’origine, il partait d’Istanbul pour rejoindre Erzurum (un peu avant Kars). Dans cette ville, les passagers devaient changer de train pour poursuivre jusqu’à Kars car l’écartement des rails sur le segment Erzurum-Kars était différent du reste de la ligne. Les rails ont entre temps été harmonisés pour permettre un trajet sans changement. Depuis la mise en place de la ligne à grande vitesse entre Istanbul et Ankara en 2012, le trajet du Doğu Express a cependant été raccourci pour démarrer à Ankara. Il parcourt tout de même 1365 km en environ 26 heures, donc à une vitesse moyenne de 80 km/h.

Comme on peut l’imaginer, en couvrant une si longue distance, le train traverse des paysages très variés. Vous pouvez admirer des régions sèches et arides, montagneuses, verdoyantes, enneigées. Le voyage fait défiler les quatre saisons.

Le Van Golu Express (Van Gölü Ekspresi) est, dans l’esprit, assez similaire au Doğu Express. Toutefois, son trajet descend davantage vers le Sud-Est de la Turquie. Il circule d’Ankara à Tatvan, sur la rive Ouest du lac de Van. Comme pour le Doğu Express, il faut signaler qu’auparavant le train partait d’Istanbul mais depuis la mise en place d’une ligne grande vitesse entre Istanbul et Ankara, le trajet du Van Gölü Express a été raccourci en lui attribuant Ankara comme point de départ. Le train parcourt 1352 km en environ 26 heures, donc à une vitesse moyenne de 80 km/h.

Tout comme son grand frère, le Van Gölü Express traverse des paysages somptueux et variés. Des plaines écrasées de soleil, des montagnes, des lacs d’altitude (notamment en raison de barrages qui ont créé des étendues d’eaux impressionnantes). Des champs printaniers et verts, des villages croulant sous la neige… Il décline toutes les couleurs et parcourt toutes les saisons.

En voilà une bonne question ! Et la réponse va peut-être vous amuser. En une phrase : « j’ai pris le train parce que je voulais prendre le ferry« . Maintenant, si je développe un peu, voici les raisons qui m’ont conduite à préférer le Van Golu Express.

Au risque de me répéter, je voulais prendre le ferry 🙂 . Alors, quitte à passer plus de 24h dans un train, autant faire d’une pierre deux coups !

Je m’explique. Je suis déjà allée à Van et, depuis, l’envie de traverser le lac de Van en ferry ne m’a jamais quittée. En effet, sur ce lac extraordinaire circule un ferry encore plus extraordinaire ! Jadis, à l’arrivée à Tatvan, le train était chargé sur un ferry pour passer sur l’autre rive. Puis, à partir de Van, il poursuivait sa route vers l’Iran. Depuis plusieurs années, la ligne de train n’est plus continue (même si les liaisons vers l’Iran ont repris en mars 2025, cf. 3ème point). Le ferry ne réceptionne donc plus le train. Cela ne l’empêche pas de continuer son service. En revanche, ses horaires ne sont pas fixes et il faut un peu de chance ou un peu de patience pour arriver à monter dessus… C’est ce qui fait tout son charme ! [Vous pouvez retrouver mon récit de cette navigation dans mon article spécifiquement dédié.]

Juste pour vous donner un petit aperçu :

Le Doğu Express est devenu « trendy » depuis que des influenceurs ont en vanté les mérites sur les réseaux sociaux. Il n’en fallait pas plus pour me convaincre de prendre l’option moins tendance.

Comme je l’esquissais ci-dessus, Tatvan et Van sont sur la ligne de train qui, jadis, ralliait Istanbul à Téhéran. Je trouve cela fascinant. A Tatvan, le train montait sur le ferry et débarquait à Van pour poursuivre son chemin vers Tabriz puis Téhéran. Au moment du Covid, la ligne a été suspendue et le train a cessé de « naviguer ». Mais les liaisons vers l’Iran à partir de Van ont repris début mars 2025 après plusieurs années de suspension. Et comme cette reprise du trafic ferroviaire vers l’Iran coïncidait avec mon projet de voyage dans ce pays, il n’en a pas fallu davantage pour me convaincre ! J’ai fait en sorte de me trouver à Van pour être dans le premier train allant vers l’Iran !

Tout cela étant dit, j’espère un jour avoir la chance de prendre le Doğu Express et découvrir Kars.

Mon voyage commence par une petite frayeur. En arrivant (bien chargée !) à la gare d’Ankara, je ne trouve mon train sur aucun des panneaux d’affichage. Konya, Istanbul,… tout un tas d’autres destinations sont mentionnées mais le train en direction Tatvan n’apparaît nulle part. Me serais-je trompée de gare ? de jour ? Le train aurait-il était supprimé en raison d’un faible nombre de voyageurs ? (j’avais en effet pu constater au moment de ma réservation – très last minute ! – que le train n’était pas fort rempli). Sueur froide… Me voilà qui fonce vers le premier guichet d’information pour obtenir plus de renseignements. On me dit nonchalamment de tourner à gauche et d’aller dans un autre hall, que le train est bien là, quai n° 2. Pour être bien sûre, je demande quand même à quelqu’un d’autre, même si le train est sous mes yeux [on ne se refait pas 🙂 !]. Cela dit, je ne le vois toujours sur aucun panneau d’affichage. Peu importe. Le personnel du train qui patiente sur le quai accepte bien volontiers de me prendre une série de photos souvenirs, pour immortaliser mon enthousiasme et je complète avec mes propres prises.

Comme expliqué plus bas en fin d’article, j’ai réservé un lit dans une cabine à 4. Le hasard a néanmoins fait que j’étais seule dans cette cabine pour toute la durée du voyage. Quelle chance !

On m’apporte des draps tout propres et un petit oreiller, on m’informe sur l’existence d’un wagon restaurant et hop ! on se met en mouvement.

Le trajet du premier jour traverse des paysages plutôt arides, écrasés de soleil. Quelques champs qui commencent à verdir – car le printemps approche ! – apparaissent de ci de là mais globalement, ce sont les tons jaunes et dorés qui dominent. J’essaye de bouquiner mais je n’en finis pas de m’émerveiller des paysages et de regarder par la fenêtre, soit depuis ma cabine, soit depuis le couloir, faisant frénétiquement des allers-retours entre les deux, ne sachant plus ou donner de la tête.

Le coucher de soleil est assez spectaculaire. Ce sont les premières neiges du voyage.

A la nuit tombée (vers 18h15), l’obscurité est totale au dehors car les environs ne sont pas habités. Je décide de me coucher tôt pour être débout dès le lever du soleil et ne rien manquer du spectacle.

Je me réveille vers 6h. Autour, tout est baigné par la lumière violacée de l’aube. Les collines qui nous entourent sont couvertes de neige. Le train passe un petit village dont les lumières scintillent dans le petit matin.

Progressivement le paysage change. La neige a fondu et l’on retrouve des champs fraichement semés dont le vert commence à pointer.

Puis le train arrive au niveau des lacs créés artificiellement par les barrages sur l’Euphrate. Les couleurs et les reliefs sont à couper le souffle.

C’est le moment que je choisis pour organiser la suite de mon voyage. Il me faut arriver à savoir quand le prochain ferry partira de Tatvan. Il est notoire que les horaires de ce ferry ne sont pas fixes, de sorte qu’il peut se passer plusieurs jours sans aucun mouvement. Je prends mon courage à deux mains et appelle le terminal avec mon portable, dans l’espoir qu’il y ait un départ dès le lendemain. Mon interlocuteur ne parlant pas anglais et mon turc étant très limité, s’en suit un échange assez laborieux… mais nous parvenons à nous comprendre : le ferry part le jour même à 16h, soit juste après l’arrivée du train ! Quelle chance ! En quelques clics, je réserve ensuite mon hébergement pour le soir-même, à Van.

C’est avec, en tête, la perspective enthousiasmante de prendre le ferry sans attendre que j’observe le paysage évoluer encore. Plus on avance, plus le panorama s’enneige…

… jusqu’à arriver aux environs de Muş, où le manteau neigeux et un épais brouillard se confondent. Le temps est comme suspendu dans une immensité blanche que le train traverse doucement.

Peu avant Tatvan, au niveau de Muş, la purée de pois est si épaisse que je m’inquiète pour la suite de mon aventure. Si la météo est aussi mauvaise à l’arrivée, le ferry va-t-il seulement partir ? Mais, à l’approche de la rive, le ciel se dégage et c’est sous un soleil radieux que le train entre en gare de Tatvan.

Pour découvrir la suite de mon aventure, et notamment mon trajet de Tatvan à Van en ferry au soleil couchant, c’est par ici.

Il semblerait que les voyages en train en Turquie aient le vent en poupe. Le Van Golu Express (Van Gölü Ekspresi) est fréquenté tout au long de l’année car les paysages sont plaisants en toute saison. Cela étant dit, d’après mon expérience personnelle et mes lectures, l’hiver est un bon moment pour tenter l’aventure, surtout en fin de saison. C’est le moment où les paysages anatoliens sont enneigés et cela les rend vraiment magiques.

Pour ma part, j’ai eu la chance d’avoir prévu mon voyage dans les premiers jours de mars. La semaine précédente (fin février, donc) les températures avaient chuté autour de -15 voire -20°C dans la région du lac. Tout était encore blanc, même si les températures avaient fort heureusement remonté depuis !

Si vous choisissez l’hiver, deux remarques tout de même. D’une part, vous risquez d’avoir assez froid à l’arrivée, soyez couverts ! D’autre part, j’aime autant vous prévenir que tout ce qui n’est pas enneigé est boueux et marron. Dans mon article sur Van, la plupart des photos incluses ont été prises lors d’un précédent séjour, au printemps, d’où le joli vert. Mais l’hiver, c’est bel et bien marronnasse 🙂 . [La mise à jour de l’article sur Van et le Lac de Van vous permettra de vous faire une idée]

L’été, vous risquez d’avoir fort chaud et surtout de voir défiler uniquement des paysages arides, sur les tons ocres à l’infini. Cela dit, ça a son charme ! Quant au printemps, cela doit sûrement être très joli également. Les paysages doivent, je suppose, conserver encore leur variété et leurs couleurs. Ce ne sont néanmoins que des suppositions car je n’ai pas pu constater cela de mes propres yeux…

Le Van Gölü Express circule (toute l’année) deux fois par semaine entre Ankara et Tatvan :

• Dans le sens Ankara -> Tatvan : départ le dimanche et le mardi à 11h30 pour une arrivée le lendemain vers 13h30.
• Dans le sens Tatvan -> Ankara : départ le mardi et le jeudi à 10h25 pour une arrivée le lendemain vers 12h.

Pour acheter vos billets, c’est sur le site d’achat de TCDD : ebiletTCDD (disponible en anglais).

Comme vous l’aurez compris, le trajet dure plus de 24h et inclut donc une nuit dans le train. Selon votre budget et votre niveau de tolérance, le trajet peut se faire selon 3 modalités de confort :

• Les cabines duo privées : une petite cabine privée avec deux couchettes (les draps et oreillers sont fournis évidemment) ainsi que du matériel de « camping » (petit frigo, petite table, je crois qu’auparavant il y avait même des plaques de cuisson mais je ne suis pas sûre que ce soit encore le cas car il y a eu quelques incidents). Le prix actuel (mars 2025) est de 2515 TL, soit environ 63 euros.
• Les couchettes dans des compartiments à quatre : très semblables aux trains-couchettes français (mais avec 4 couchettes et non 6). C’est l’option que j’ai choisie et j’étais seule dans ma cabine donc j’avais de l’espace. C’est sûrement un peu plus serré à 4 ! Les couchettes sont assez confortables, tout comme les sièges lorsque les couchettes ne sont pas dépliées. Là aussi évidemment les draps sont fournis. Le prix actuel (mars 2025) est de 1275 TL soit environ 33 euros.
• Les sièges assis : il est aussi possible de faire le trajet dans un siège assis pour une somme plus modique. A savoir que les wagons avec des places assises sont de type 2 + 1 (deux sièges d’un côté, 1 de l’autre, comme en première classe en France). Vous pouvez donc choisir un siège isolé si vous le souhaitez. Néanmoins, si le train n’est pas très rempli, vous aurez peut-être intérêt à avoir réservé un siège du côté duo pour avoir plus d’espace et pouvoir vous allonger tranquillement pendant la nuit. Le prix est de 755 TL soit environ 19 euros.

J’ai beaucoup entendu dire que le Doğu Express était pris d’assaut depuis que des influenceurs en avaient vanté les mérites et que les billets étaient vendus des mois à l’avance. J’avais aussi cru comprendre qu’il en allait de même pour le Van Gölü Express. Je suppose que cela dépend de la saison à laquelle vous entreprenez le voyage mais voici le constat que j’ai pu faire, à titre personnel, en entreprenant le voyage début mars (c’est-à-dire en principe à une saison convoitée car c’est l’époque où l’on peut voir les paysages enneigés !) :

• les places assises étaient presque intégralement disponibles (c’est-à-dire 4 wagons de 60 places) moins d’une semaine avant la date prévue du voyage
• les cabines à 2 et à 4 étaient « sold out » à environ 1-2 mois de la date du voyage mais se sont presque toutes libérées comme par magie la semaine précédent le départ. Ce sont peut-être des tour operators qui pré-réservent les cabines et les annulent au dernier moment s’ils n’ont pas de clients (?).

Moralité de l’affaire : j’aurais tendance à vous conseiller de surveiller fréquemment la page et de faire votre réservation plutôt au dernier moment. Avec un peu de chance, vous bénéficierez d’une couchette qui se sera libérée quelques jours avant le départ. Et dans le pire scenario, vous voyagerez « assis » (officiellement du moins car, pour mon voyage, les wagons « assis » étaient à moitié vides donc il y avait de la place pour s’étaler).

Pour que les gourmands ne s’inquiètent pas, sachez que le train possède un wagon restaurant qui sert nourriture et boissons (paiement en carte et en cash). On y vend des toasts, des soupes, des snacks en tout genre et des plats plus substantiels. Vous trouverez de quoi vous nourrir et vous désaltérer en cas de besoin et à toute heure (y compris durant le ramadan). Cela ne vous empêche évidemment pas d’apporter votre propre casse-croûte.

J’espère que ce récit et ces informations vous seront utiles un jour, car ce voyage vaut vraiment le détour ! Et si vous avez des questions (ou des suggestions), n’hésitez pas à me les adresser en commentaire ou via le formulaire de contact. J’y répondrai avec plaisir !

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